lundi 24 décembre 2007

Élections en Thaïlande

Élections sous surveillance en Thaïlande

Quinze mois après le putsch militaire, l'armée garde la haute main sur la vie politique à Bangkok.
Quinze mois après avoir renversé Thaksin Shinawatra, qu'ils décrivaient comme un «premier ministre tyrannique et corrompu », les militaires thaïlandais tiennent parole : ils organisent ce dimanche des élections législatives censées permettre le ré­tablissement de la démocratie.
Les putschistes qui « se voient comme les gardiens de l'avenir politique de la Thaïlande » de­vraient cependant maintenir cette démocratie «en garde à vue» , estime l'analyste politique Thitinan Pongsudhirak. Ainsi, après avoir quitté la tête de l'armée, Sonthi Boonyaratglin a pris la direction d'un comité national d'éradication des fraudes électorales. Et, hier, la junte a fait adopter une loi draconienne en matière de sécurité intérieure qui lui permet de garder une emprise sur le prochain gouvernement.
Les analystes s'attendent à une frénésie de tractations après le scrutin pour former une coa­lition dirigée soit par le Parti du pouvoir populaire (PPP), pro-Thaksin, soit par le vieux Parti démocrate. Bref, le nouveau gouvernement sera faible et son espérance de vie, courte.
Les Thaïlandais ont le ca­fard. Ils se sentent floués. Sous couvert de dévouement, les gé­néraux se sont en fait assurés qu'a­ucun parti ne dérangera plus l'élite traditionnelle le palais royal, l'armée et l'administration. Alors, la politique, la population ne veut plus en en­tendre parler.
Même la société civile a mis ses utopies démocratiques au placard et ne descend plus dans les rues de peur d'être accusée de déloyauté à l'égard du mo­narque. À une semaine du scrutin, 61% des électeurs étaient encore indécis, selon l'institut de sondage Abac.
Le coup d'État militaire du mois de septembre 2006 était «le pire des dix-neuf putschs de l'histoire de la Thaïlande mo­derne» , selon l'universitaire Chalong Soontravanich : «la junte qui promettait unité, stabilité et démocratie a échoué sur presque tous les fronts».
«Incom­pétence à gouverner»
Le pays est toujours aussi polarisé, comme l'a prouvé le référendum organisé en octobre. La Constitution a certes été approuvée, mais le texte a été rejeté par 63% des électeurs du Nord-Est, bastion traditionnel des pro-Thaksin. «Les militaires ont montré leur incom­pétence à gouverner» , ajoute l'économiste Ammar Siamwalla.
La junte a tout de même rempli une partie du contrat en lançant des poursuites judiciaires contre le premier ministre dé­chu, réfugié à Londres et sous le coup de mandats d'arrêt.
Mais « le prix que nous payons pour être débarrassé temporairement de Thaksin est trop élevé » , estime l'universitaire Thi­tinan. 31 des 76 provinces vivent encore sous loi martiale, notamment dans le Nord et le Nord-Est.

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